Le lexique en politique

Comme vous le savez, les économistes, les sociologues, les éditorialistes et à plus forte raison les politiciens usent d'un vocable particulier, parfois scientifique, que les néophytes ont peine à décrypter. Le lexique en politique tient une place telle que perdre la bataille sémantique se résume souvent à perdre la bataille des idées.

 

La communication prend toute la place disponible. "Avancer", "moderniser", "progrès", "renouveler"....etc,  quand cessera t-on d'utiliser ces termes totalement vides de sens, mensongers et manipulateurs, tant que le but n'est pas clairement défini et diffusé? Toute la campagne d'Emmanuel Macron à l'élection présidentielle puis celle des candidats R.E.M. aux élections législatives reposent sur cette logique du néant. Il suffit de visionner le clip officiel de présentation des candidats qui totalement édifiant au niveau des propositions. Il n'y en a pas une.

 

Dans la même lignée, combien de fois avez-vous entendu nos élus tenir "un discours de vérité"? Voilà une expression surprenante. Cette formule proclamant la vérité en principe (dont la recherche est vertueuse en philosophie) et si chère à la droite, n'est pas une notion en politique.

 

Le politique ne doit pas prétendre révéler la vérité ni la rétablir, ce n'est pas son rôle. Parler de vérité évoque une vision très divine de l'exercice du pouvoir. Parler de vérité suppose que les autres ne la disent ou ne la défendent pas et donc permet d'avancer que nos concurrents s'y soustraient, tous sans exception. Que ce sont donc des menteurs. La notion est très autocratique et ne laisse pas d'espace à la légitimité des autres. Quelle vérité est dite? La leur, bien entendu, sélectivement, en se gardant bien d'occulter celles qui les dérangent.

 

En politique, il n'y a que des orientations ou des choix dans le cadre d'un rapport de force.

 

Encore faut-il que les choix puissent être opérés dans un climat où la différenciation et la pédagogie puisse s'exprimer. En apposant à tout-va le terme de "populisme" pour renvoyer dos-à-dos l'extrême droite et la "gauche de gauche" comme disait Pierre Bourdieu, on fausse délibérément le débat démocratique. Surtout que ce ne sont pas les sujets qui manquent.

 

Ce mot valise ne dit pas le sens de la portée recherchée.

 

Il n'a qu'un seul objectif: vous empêcher de penser et vous tenir à l'écart du champ de la décision!

 

Qu'il est complexe d'évacuer la vapeur née de l'enfumage d'une Marine Le Pen qui emploie les termes de "dégagisme", "d'oligarchie", qui cite dans ses discours Jaurès, l'ennemi politique séculaire de son camp et De Gaulle dont il est inutile de rappeler l'opposition frontale dans la tradition républicaine. Pour les électeurs qui ne suivent pas au quotidien l'actualité politique, comment faire la part des choses? Comment différencier le vrai du faux, justement? Comment laisser exprimer son libre arbitre quand l'information n'est pas neutre?

 

Dans le prolongement, quel n'est pas le traitement médiatique des groupes antifascistes relégués au même rang que les fascistes eux-mêmes. La moindre des choses serait d'être antifasciste, non?

 

Enfin, dernier exemple, depuis les années 1980, pour  les employeurs, les "cotisations salariales" sont transformées en "charges sociales". La guerre des mots a été gagnée par les employeurs puisque aujourd'hui l'immense majorité de l'opinion publique emploie ce terme, même inconsciemment. Il ne faut jamais oublier que les cotisations sociales constituent du salaire différé. L'apparition de l'expression de "charge sociale" n'est liée qu'à l'introduction d'une part de fiscalité dans la fiche de salaire (la C.S.G.).

 

Le discours continuel de vouloir baisser les charges sociales doit trouver une traduction immédiate dans votre esprit: on vous indique qu'il faut baisser les salaires!

 

La séparation même des cotisations salariales et patronales n'a pas de justification naturelle. Tout est salaire. Une charge est forcément lié à une dépense de structure, pas à une activité humaine.

 

De manière générale, l'induction en erreur des citoyens devrait constituer une faute grave, au moins morale, et ce malgré la présence exponentielle de la dimension "marketing" proposée dans l'offre politique. Il est temps de réhabiliter la politique.

 

Un dol en droit des contrats est une manœuvre d'un cocontractant dans le but de tromper le cosignataire pour provoquer chez lui une erreur.

 

Face à ce vice de consentement, les hommes et les femmes politiques usant de ce stratagème nous doivent des comptes . Partout. À tous. Tout le temps.

 

 

 

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