La mondialisation réduit-elle les inégalités ?

Le terme de mondialisation est, depuis un demi siècle environ, commun à l'ouïe de la population. Il désigne le libre échange à l'international des biens et des services. D'origine américaine, cette notion est surtout analysée comme l'extension de la théorie libérale smithienne du 18ème siècle et par ailleurs comme la confirmation du capitalisme comme modèle systémique pour l'accès à la modernité.

 

Il a été intronisé "système de référence" avec le virage néolibéral des années 80 jusqu'à nos jours, avec notamment la crise financière puis économique de septembre 2008. L'heure du bilan a sonné, il convient d'analyser les apports. Le capitalisme est étroitement lié à la mondialisation. Cette dernière est tout particulièrement contestée dans l'hexagone avec mouvements qui voient le jour. Outre le caractère historique des luttes que nos pays a, cet éveil des hostilités laisse présager un problème de fond.

 

La question que l'on est en droit de se poser serait la suivante: À qui profite la mondialisation? Et a fortiori, ce système augmente t-il les disparités? On conviendra d'élaborer une réponse en deux temps. La logique du profit capitalistique comme finalité du modèle sera mis en avant en priorité. Dans une seconde partie, on élaborera un argumentaire qui clamera la progression de l'économie mondiale d'ensemble.

 

I/ Un modèle dans la logique du profit capitalistique

 

Le souci de tout entrepreneur est de maximiser le profit qu'il peut réaliser. La mondialisation tend à favoriser les grandes entreprises en leur permettant une mobilité illimitée sur le marché mondial. Cette mobilité pose le problème des délocalisations de production. Par ailleurs, on remarque que des inégalités locales et continentales qui n'ont pas tendance à se réduire, bien au contraire.

 

            a) Le problème des délocalisations de production

 

Avec l'approbation générale de la libre implantation des firmes, les cas de chômage dus aux décentralisations de production semblent avoir augmenté. Cette affirmation n'est réelle que par la nature des décentralisations. Il convient de rappeler quelques données fondamentales. Ce phénomène est loin d'être nouveau, il a toujours existé.

 

Les délocalisations ne sont pas brutes. En effet, lorsqu'une entreprise s'en va, il y a automatiquement une relocalisation ailleurs; c'est un système de flux.

 

Cependant les dommages sont visibles localement avec un chômage massif. Historiquement, les délocalisations ne présentaient pas les mêmes problèmes puisque l'on a assisté à des mutations des conditions de travail et notamment du fait du "contractualisme". Auparavant, un travailleur pouvait être licencié le soir et retravailler dans l'usine d'en face le lendemain. La vision moderne de la délocalisation est toute autre.

 

Le firmes multinationales (FMN) délocalisent leur production dans la recherche du profit le plus intense. Pour cela, les entreprises peuvent avoir recours à plusieurs mécanismes. Baisser les salaires ou augmenter le prix des produits constituerait une baisse non négligeable de la demande effective de la part des consommateurs. L'entreprise doit alors jouer sur les charges d'exploitation. Outre les mouvements pour raison fiscale, les entreprises vont donc s'implanter dans des régions où la main d'œuvre est bon marché. Elle l'est tellement que pour être attractives, les entreprises auront même tendance à rehausser les rémunérations au dessus du revenu moyen perçu par un chinois, un polonais ou un taïwanais en fonction de la zone d'implantation.

 

La concurrence pousse les entreprises à être toujours plus performantes et la doctrine libérale en est l'origine. Il faut un concurrence pure et parfaite (atomicité, fluidité, mobilité, homogénéité, libre entrée et sortie, transparence) ainsi qu'un flexibilité accrue pour être efficace sur le marché. Par flexibilité, on entend celle des conditions de travail qui sont souvent de mise et font ressortir un discours hostile. Cette situation est ni plus ni moins que la dénonciation sur la plan national de Karl Marx sur le rapport entre les dominants et les dominés. Pour preuve, la production ne s'adresse pas aux ouvriers de ces firmes mais consommateurs occidentaux.

 

Nous ne sommes pas dans une logique fordiste qui n'est pas la panacée mais peut avoir sa part de défense vis-à-vis des forces de travail. Dans les usines Ford, le travailleur était aussi perçu comme un consommateur mais encore plus comme la demande potentielle. Dans le cas des délocalisations, les entrepreneurs ne se préoccupent pas des situations des employés et on peut également dénoncer une déshumanisation; l'homme est un outil.

 

Bien entendu, les FMN apportent au pays hôte un emploi qui n'existait pas mais les gains sont autrement plus forts pour la maison mère.

 

 

            b) les inégalités se creusent

 

Quoiqu'on en dise, quoiqu'on en pense, le constat est éloquent: les riches sont de plus en plus riches. Les rentiers ont été remplacés par les actionnaires. Les marchés financiers constituent depuis 1980 un véritable sanctuaire pour les détenteurs de capitaux. Ils titrisent et profitent des instruments de la finance; ceux qui sont la résultante des progressions globalisatrices. Si l'évolution était comparable pour les classes moyennes ou populaires, on ne donnerait pas tellement d'importance à ces changements de priorité: de la productivité vers la prédominance du cours de l'action.

 

En interne, dans les pays développés, on constate un ralentissement économique depuis la fin des Trente Glorieuses (1945/1975). La croissance économique est atone et ce, depuis presque quarante ans. Les outils statistiques de l'INSEE sont catégoriques et la tendance énoncée se vérifie. Si on découpe la population en déciles, on remarque que la différence inter-décile entre D1 (revenu le plus haut des 10% les plus pauvres) et D9 (revenu le plus bas des 10% les plus riches), on remarque que le coefficient est passé du simple au double pour arriver à presque 7 aujourd'hui. Nul doute qu'il y a une corrélation entre la mondialisation et l'excroissance des inégalités. L'un des phénomènes qui permet d'être encore plus catégorique est la montée vertigineuse au créneau des mouvements altermondialistes.

 

Il y a des alter mondialismes qui se composent d'écologistes, d'anticapitalistes et de partisans de l'équité mondiale. Outre ce qu'on trouve à l'intérieur des pays développés, le contraste est encore plus saisissant si l'on compare avec l'ex tiers-monde qui n'a plus cette appellation avec l'émergence de l'Inde et de la Chine. La mondialisation renforce la primauté des grandes puissances et il suffit de regarder la composition des grands organismes, ne serait-ce que le G8 devenu G20. Il y a une part d'élitisme qui témoigne une ouverture finalement très limitée au monde. Notons que cette mondialisation marginalise tout un continent qu'est l'Afrique. C'était déjà un problème pour nos prédécesseurs, la donne n'a pas changé et les anticipations vis-à-vis de la situation future du continent noir seraient les bienvenues. Le système mondialisé coïnciderait avec la confirmation de la volonté d'encrer les puissances au plus haut de l'échelle mondiale. Il ne faut pourtant pas omettre les bonnes volontés de régulations.

 

 

II / Un système qui tend à tirer vers le haut l'économie mondiale?

 

On a vu la vision portée sur la mondialisation dépendait plus ou moins du patrimoine financier ou aurait une influence certaine. De tous bords, des améliorations ont eu lieu. La collaboration entre états a des effets positifs et la libéralisation des échanges se veut, en principe, au profit de tous.

 

            a) Des collaborations entre états

 

L'OMC (Organisation Mondiale du Commerce) ne se revendique pas comme étant un car visant à favoriser les plus puissants. Le système en place a été élaboré par le biais d'accords négociés où les pays en voie de développement sont conviés. On signe ou on réfute, il y a une liberté, même si les statuts et les influences des pays puissants laissent présager des décisions pas toujours transparentes et égalitaires. Deux institutions ont vu le jour. Le système monétaire international avait été créé dans l'intention de sécuriser les échanges entre nations par la voie des parités fixes. Ce système volera en éclats en 1971 à Bretton-Woods. Par ailleurs, le FMIa été pensé pour équilibrer les balances commerciales des pays. Tous ces organes font participer et aident aussi les pays en voie de développement. Il y a une coopération fondée sur la réciprocité générale. Cela attenue le caractère purement libéral montré du doigt avec une réelle volonté de régulation.

 

On ne peut nier le développement de certaines régions du monde. La mondialisation prétend unifier le monde en un ensemble. On remarque que les réponses régionales vont dans le sens de grand ensemble. Les unions continentales visent à élever le niveau de vie des pays dit "moins développés". Avec l'Union Européenne, ce fut le cas pour l'Espagne ou le Portugal. Les différences et évolutions au niveau local sont véritablement impressionnantes.

 

Que ça soit pour les industries, les infrastructures et lorsque l'on est touriste du seul fait des voies et des réseaux, c'est une donnée incontestable.

 

Dans une moindre mesure, les réponses régionales se situent ailleurs (l'ALENA, le Mercosur, l'ASEAN) et ces coopérations ne sont pas les seuls facteurs de réussite. Malheureusement cet éventail d'outils ne suffit pas. L'orientation politique joue le premier rôle au poste de commande.

 

 

            b) Une libéralisation des échanges "au profit de tous" ?  

 

Adam Smith, père du libéralisme et figure emblématique de l'économie justifiait sa théorie sur la recherche du plus grand bonheur possible pour le plus grand nombre. Cette idéologie hédoniste supposerait que la mondialisation par prolongement serait en faveur de l'harmonie collective. Sans être aussi idéaliste, certains avantages sont identifiables. Bien qu'à des égards, la mondialisation soit le théâtre d'une multitudes de maux, il serait puéril de ne faire que l'attaquer. En effet, jamais le niveau de vie global n'a été aussi élevé dans l'Histoire de l'Humanité. Il est jusqu'à récemment en constante évolution. Il faut donc se poser la question de sa stagnation ou de son recul le cas échéant. Toujours est-il, que pour rajouter de l'eau au moulin de l'inégalité, ce niveau augmente plus vite dans les pays développés que dans les autres. On observe un rattrapage relatif des nouveaux pays industrialisés (NPI) où là les inégalités se réduisent!

 

Au delà des conditions de vie et des revenus, la mondialisation se veut être une révolution sur l'accès aux cultures et aux biens. Encore une fois, il faut avoir une vision très occidentale. Nous avons à notre disposition un panel impressionnant de biens qui n'étaient pas à notre portée il y a encore quelques décennies. Pour les pays en marge, la résultante est toute autre et pourtant ce ne sont pas des sociétés autarciques.

 

 

 

La mondialisation n'offre que peu d'alternatives à la lutte contre les inégalités. Il faut dire que ceux qui influent font interagir une morale qui ne va pas dans ce sens. Dans d'autres domaines comme le progrès technique, la productivité, l'essor des nations comme la Chine, la mondialisation joue un rôle actif. Bien qu'elle ne soit pas une source concrète de solutions, on ne peut attribuer à la mondialisation des problèmes qui étaient présents avant son application.

 

La mondialisation est un enfant du capitalisme et ne doivent pas être confondus non plus avec la globalisation, trop axée sur la Finance.

 

 

 

Une mondialisation collective est possible, en revoyant notre postulat économique de base. 

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