Les allocations familiales doivent-elles ne plus être allouées aux ménages les plus aisés ?

C'est l'un des sujets du moment, un des chantiers ambulant qui trouve écho dans une situation où les inégalités vont croissant.

 

Le premier postulat est que les familles les plus aisées n'ont pas besoin, c'est entendu, matériellement et financièrement des ressources versées pour couvrir le "risque" d'avoir des enfants. Il s'agit d'un risque au sens du système intrinsèque des cotisations sociales qui visent à couvrir les risques pour tous les contributeurs une fois que ceux-ci se présentent.

 

La forme de notre système social hybride, son inspiration beveridgienne et la règle des "3U" (unité, uniformité, universalité) ne peut être ignorée afin d'aborder le sujet de fond.

 

L'universalité est un principe fondateur de notre mode de protection sociale. C'est pourquoi les communistes sont souvent hostiles à toute remise en cause de tout ce qui porterait modification du cadre de 1945.

 

Il faut remettre en perspective ce qu'est une cotisation, qui n'est pas une charge, qui n'est pas un moyen de redistribution mais qui est du salaire différé et un bouclier contre les aléas de la vie.

Ce n'est pas une charge  puisqu'il est question d'humain. Ce n'est pas moyen de redistribution qui est le propre de l'imposition.

 

La mesure a priori juste de ne pas attribuer d'allocations à certains ménages rompt le principe d'universalité. À un devoir ne correspond pas un droit. De plus, un glissement vers de l'imposition redynamiserait la fiscalisation de la fiche de paye qui donne raison aux néolibéraux et à Von Hayek avec la qualification de "charges".

 

La remise en cause de l'universalité au motif d'une mesure dite de "justice sociale" serait le premier signe de déconstruction du système du CNR et la première pierre vers le basculement sur un système assurantiel et de capitalisation. La dégressivité instaurée dans le mandat de François Hollande échappe déjà au principe d'uniformité.

 

La seconde possibilité théorique serait l'exonération de la contribution de la cotisation patronale de 5,25% (hors allègement Fillon) pour les employés non concernés. Puisqu'il n'y a pas de droit ouvert malgré la présence du "risque", ce ne serait pas illogique au fond.

 

Le problème est que les plus gros contributeurs sont les plus riches puisque la cotisation est proportion de la rémunération brute. Par conséquent, une exonération de cette nature (comme les autres du reste) entraîne la fin du dispositif d'allocations familiales par manque de financement.

 

La suppression de l'allocation de cette prestation (et non pas d'une "aide") déboucherait inévitablement sur un changement de paradigme à venir.

 

Une bonne piste serait de revoir la définition de la "famille" en fonction de l'évolution de la société. À l'heure où la France voit son taux de fécondité équivalent à deux enfants par femme (record d'Europe mais en baisse sur une période longue), serait-il cohérent d'attribuer les allocations familiales dès le premier enfant? L'ensemble "couple avec un enfant" ne constitue t'il pas une famille? L'allocation n'est versée, dans ces conditions que dans les DOM et donc échappant au principe d'unité cette fois.

 

La modification de l'allocation de dispositifs prévues par le paiement des cotisations est le premier coup de couteau dans le contrat collectif du Conseil National de la Résistance. Une mesure aux allants de justice et aux apparences "de gauche" servirait uniquement la cause des néolibéraux afin d'installer un renouvellement de la pensée vis-à-vis de la protection sociale basée sur la solidarité vers une protection sociale "responsabilisante" et individuelle.

 

 

Pour demain, s'attaquer davantage à la santé.

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